Une petite soeur. L'année suivante, encore une autre petite soeur. L'année d'après, une petite fille vient à nouveau au monde. Et puis, comme si c'était inespéré, un petit-frère. Ma soeur et moi, on a eu la force après de s'en occuper comme s'ils s'agissaient de nos propres enfants. Nos parent n'avaient pas l'air de se rendre compte qu'ils les délaissaient, peu à peu.

En fait, je crois qu'ils n'étaient pas vraiment responsables dans leur genre. Su Ah, ma grande soeur de trois ans mon aînée, me disait souvent, j'ai juste envie de les secouer et de leur dire mes quatre vérités en face. Moi, dans tout ça, je souriais simplement, comme un idiot. Qu'est-ce qu'on pouvait leur dire pour qu'ils changent ? Ils ne nous écouteraient pas, de toute manière. La vérité, la simple vérité, était qu'ils n'avaient tout simplement pas le temps. Pas le temps pour leurs propres enfants.

Au fur et à mesure des année, je commençais à prendre conscience des choses. Je voyais ma mère et mon père rentrer du boulot, déposer leurs affaires, et nous retrouvions la table de la salle à manger en silence, avec quelques remarques, par-ci par-là. Su Ah ne disait rien, mais elle fulminait. Je les regardais, ils parlaient de boulot, de boulot, de boulot, encore, encore, encore. Ils ne savaient que dire ça, ils n'avaient que ça en bouche. Mes petites soeurs et mon petit-frère commençaient aussi à se rendre compte que tout ça n'était pas normal. Pourquoi Papa et Maman ne nous portent-ils pas plus d'attention ? Mais qu'est-ce qu'on a bien pu faire ?

Un matin est venu, un matin que toute la famille attendait avec impatience. Je me rappellerai toujours de ce jour-là, il est gravé à jamais dans ma mémoire. Il est la preuve même de l'indifférence de nos parents envers nous. Mon petit-frère dévale les escaliers à la vitesse grand V, il est neuf heures du matin. Je le vois descendre des escaliers, l'attrape et le fait voler en l'air. Il se prend pour un oiseau et rit. Je le fais descendre par terre et il me regarde alors avec de grands yeux. Aujourd'hui, c'est mon anniversaire ! On va au parc d'attractions, hein ! Maman elle a promit ! Je me rappellerai toujours de ce sourire si innocent, tellement heureux que l'on se souvienne de son anniversaire, tellement heureux que ses parents lui portent enfin de l'attention. « Oui, Ji Hyun. On va au- » La porte se referme à la volée. Immédiatement, je me rus à l'extèrieur, nos parents partent au boulot, encore. « Je croyais qu'ils avaient prit leur journée... » Su Ah avait murmuré ça si férocement que j'en ai encore des frissons dans le dos. Ji Hyun commençait à faire la tête. « Attendez ! On avait pas prévu d'aller au parc d'attractions pour l'anniversaire à Ji Hyun aujourd'hui ?! » Ils se sont retournés vers nous, j'avais crier le plus fort que j'avais pu. « Ah oui. Ben, on ira une autre fois, on a beaucoup de boulots au bureau aujourd'hui. A ce soir. » Suite à cela, Su Ah et moi avons passés la journée à réconforter Ji Hyun. C'était un samedi, je m'en rappelle. On a finit par fêter entre enfants, l'anniversaire du plus jeune de la famille. Lorsqu'ils sont rentrés le soir, ils étaient, je cite, trop crevés pour passer la soirée avec, bon pas avec nous, mais au moins, avec Ji Hyun.

Mon enfance a été assez mouvementé. Nos parents n'ont jamais réussit à être assez organisé pour pouvoir s'occuper des plus jeunes. Du coup, les trois-quart du temps, Su Ah et moi, nous nous retrouvions à faire les parents. On assumait bien tous les deux, mais on savait très bien que ce n'était pas à nous de faire ça. Mais on ne pouvait rien dire, de toute manière.

L'école, j'en avais rien à foutre. Certes, ce n'était en somme, pas un très bon exemple de grand-frère, mais vous vouliez que je me force ? Je détestais l'école, je haïssais les cours. D'ailleurs, ça fonctionne aussi actuellement. Les études, ça n'a jamais été mon truc. C'est vrai, que trouvez-vous d'intéressant à un prof' qui radote et radote et radote et radote trente-six fois la même chose, à savoir, les lois binomiales et tout le tralala. Moi, personnellement, savoir résoudre l'épreuve de Bernoulli-truc ne va pas m'aider à bosser plus tard. Bref, voilà comment je voyais et que je vois toujours les choses. Alors voilà, je préférai traîner dans la rue avec mes potes et sécher les cours, plutôt que d'y assister et crever d'ennui à chaque heure. Evidemment, nos parents étaient si occupés par leur travail, qu'ils ne se rendaient absolument pas compte de mes nombreux échecs scolaires, qui s'accumulaient de jour en jour.

Parfois, lorsque Su Ah m’appelait au Lycée, c'était souvent pour me prévenir que Ji Hyun avait fait une connerie et qu'il fallait que je m'y rende ou bien qu'une de nos soeurs se faisait charrier et qu'il fallait que j'aille aider Su Ah qui n'y arrivait pas toute seule. Il pouvait y avoir aussi des trucs tout cons, comme un chapeau oublié à la maison, un livre, ou bien encore un manteau. Tout ça pour dire, que les études, je m'en contre-fichais, et que ma famille comptait et compte encore plus que tout.

Déjà depuis assez jeune, j'avais toujours voulu devenir multifonction. Ce souhait s'est accentué lorsque le Lycée s'est enfin terminé et que j'ai commencé dans la vie active. N'ayant rien foutu aux études, j'ai longtemps enchaîné les petits boulots, mais sans véritable succès. Ma grande-soeur Su Ah, a immédiatement réussit dans le métier qui lui tenait à coeur, c'est-à-dire, photographe. Mais ça, c'est parce qu'elle avait bossé, contrairement à moi. J'ai finis par me retrouver dans une pâtisserie où un patron pas très sympathique m'a apprit ce qu'il savait. Enfin, on ne peut pas dire qu'on s'est très bien entendus en fait. Ce patron est le pire que j'ai eu jusqu'à aujourd'hui. Strict et ennuyant, il m'a apprit ce qu'il savait, oui, mais ce qu'il savait, c'était plutôt nul. Ce mec, en plus d'avoir tous les défauts du monde, est le pire prof de pâtisserie qu'on pouvait avoir dans sa vie. Bien sûr, c'est tomber sur moi. J'aurais bien eu envie de lui foutre mon poing dans sa gueule, mais je me suis retenu, évidemment. J'avais assez gâché de choses dans ma vie comme ça.

J'ai débuté dans le métier de pâtissier peu après. Mais franchement, je n'étais pas ce qu'on pouvait appeler un pro. Je tenais de ce pauvre type un apprentissage on ne peut plus ingrat. Moi qui rêvais d'être multifonction, j'ai cru à un moment que c'était raté.

Jusqu'au jour, le fameux jour où la foudre s'est abbatue à Séoul. Elle m'est d'ailleurs tombée dessus, comme ça, d'un seul coup. Je n'ai pas trop compris le pourquoi du comment, mais je me suis réveillé par terre, encore tout chamboulé. Je pensais que ma vie reprendrait normalement, même si cet évènement restait franchement bizarroïde. La foudre venait de me frapper, et j'étais encore vivant ? Incroyable, il fallait le dire.
Au bout de quelques jours, j'ai commencé à comprendre que quelque chose chez moi avait changé. Au fur et à mesure, j'ai compris que j'étais doté d'un don, d'un pouvoir unique. Il m'a fallut un sacré bout de temps avant de comprendre comment il fonctionnait, ce dont il s'agissait et comment bien le maîtriser. Mais actuellement, je m'en sors plutôt bien. J'ai la capacité de reproduire tout ce que je vois, depuis que cette foudre m'est tombée dessus. J'avais toujours voulu devenir multifonction, je l'étais à présent. Une courte analyse de ce que j'ai sous les yeux et je suis capable de le refaire au centimètre, au millimètre près même. Ce pouvoir a complètement changé ma vie. Oui-oui, moi qui avait reçu un apprentissage pas très glorieux auprès de l'autre vieux, je montais en grade, passant du plus mauvais pâtissier au meilleur ouvrier de Séoul, rien que ça. Je vous assure, je n'en suis pas peu fier.